Combien de collaborateurs n’ont pas maudit à certains moments les règles ou décisions imposées, dont personne n’est responsable et derrière lesquelles certains se cachent ? Ces décisions, réactions ou attitudes qui se révèlent absurdes et inadaptées à la situation et entrainent un désengagement et une déresponsabilisation du collaborateur.
Fini le temps où les collaborateurs exécutent leurs activités en se conformant à des procédures et à des normes, à partir d’un ordre ou d’une consigne. Face au nouveau récit économique et sociétal, les départements des Ressources Humaines doivent promouvoir et incarner une culture d’autonomie, d’esprit critique et d’innovation. Une culture qui encourage les prises de décision locale au service du projet commun.
A commencer par les processus de gestion humaine de l’entreprise.
L’entreprise, organisme vivant en pleine métamorphose
Les transformations sociétales, économiques et environnementales trouvent un écho au cœur de l’entreprise. Mettant le mythe de la croissance infinie au vestiaire, l’entreprise se veut créatrice de valeur pour l’environnement, pour la société et pour l’ensemble des parties prenantes. Du côté des collaborateurs, la relation au travail se transforme également : les collaborateurs recherchent un travail qui leur permet de s’épanouir au rythme de leur phase de vie : sécurité, équilibre vie privée / vie professionnelle, contribution, autant d’éléments essentiels à la relation de travail. Un travail où autonomie rime avec plaisir, développement, contribution, réalisation.
Coopter l’esprit des règles
Pour répondre aux challenges de l’entreprise, nos organisations ont désormais besoin de collaborateurs qui soient capables de faire preuve d’initiative, de créativité et d’esprit critique. Or, à force de règles, d’instructions et de contrôle que nous renforçons au moindre problème, les organisations entretiennent malgré elles un climat peu propice à l’autonomie. L’abus de règles, renforcé par une culture de « à qui la faute » a pour effet d’inhiber la prise de responsabilité du collaborateur ou du manager. Ce qui dessert l’entreprise !
En réponse, l’entreprise n’a pas d’autre choix que de remettre les centres de décision dans les mains des équipes de taille humaine. L’autonomie respectueuse du collectif, cette capacité à se gouverner soi-même au sein de l’espace commun, ressort comme le grand défi des entreprises. Il s’agit d’encourager et d’équiper chacun à faire preuve de discernement et d’initiative face à la diversité des problématiques locales pour apporter des réponses qui ont du sens sur le terrain, au rythme du business et en accord avec le projet et les valeurs du collectif.
La culture bascule du « comment faire » vers le « pourquoi », une culture basée sur le pouvoir de la proximité, où l’esprit de la règle et du bien commun est partagé, intégré et coopté. Une culture « Glocale (1) » qui renoue avec la taille humaine, qui positionne la gestion des personnes comme une responsabilité collective d’équipe, au sein d’un enjeu plus global. Il s’agit d’un changement profond laissant ainsi les modalités d’actions dans les mains des collaborateurs éclairés sur l’enjeu collectif.
Le département des Ressources Humaines endosse alors le rôle de gardien de la culture d’un esprit critique et des principes de subsidiarité et d’autonomie. Ces valeurs qui doivent permettre, au-delà des règles du jeu, de prendre des décisions de sens, proches des équipes et de leur réalité de travail.
Commencer par les processus de gestion humaine de l’entreprise
Et si les départements des Ressources Humaines commençaient par s’occuper de leur propre jardin ? Car les politiques de gestion des personnes apporteront solutions ou frustrations en fonction des valeurs véhiculées et de la prise de responsabilité des équipes dans les décisions.
Les départements des Ressources Humaines (RH) ont été créées pour gérer la ressource dans la masse. Leur mission étant de créer ce cadre collaboratif qui permet le projet de l’entreprise, la première préoccupation des RH reste la mise en place d’un système.
Une formidable machine, composée de référentiels, de processus et de règles, qui nous permet de sceller le sort de chacun des collaborateurs de manière mécanique, objective, systématique, équitable.
Cette « systématisation » de la Ressource Humaine a très bien répondu aux besoins de l’entreprise de l’ère industrielle dont la finalité était d’inlassablement augmenter la performance de la production normée par un système qualité sans faille. Ancrée dans des valeurs de discipline, de rigueur, de loyauté et de professionnalisme, l’organisation scientifique du travail se base sur la division des tâches, la hiérarchie, la centralisation des décisions, les outils et processus standardisés, le lien de subordination. Les RH, avec leur arsenal de référentiels et de règles, ont été un formidable rouage de toute cette machine bien rôdée.
Recrutement, développement, gestion de carrière : il est temps de positionner le collaborateur comme responsable de lui-même, de son développement, du développement des équipes. Les RH se doivent d’alléger leurs règles, de sensibiliser et former chacun à l’esprit des règles et au respect de l’enjeu collectif et du cadre global et de donner les rênes au collaborateur et au manager. Pour que nous ne cachions plus derrière le système mais que nous agissions de manière responsable.
Face à ces mutations profondes, les RH, en incarnant les valeurs de l’entreprise, sont en première ligne pour tracer le nouveau récit humain.
Réconcilier notre culture de gestion des masses avec la spécificité de la personne, l’importance des relations et les nouveaux objectifs des entreprises, tel est l’enjeu.